Tout ce que vous devez savoir sur le télétravail frontalier

Droit du travail, sécurité sociale et fiscalité : nous vous expliquons tout dans cet article. Retrouvez en dernière partie notre FAQ qui reprend vos principales questions ! Pour toute question non abordée dans le présent article, vous pouvez nous contacter via juridique@frontaliers-grandest.eu 

Télétravail et droit du travail

Le télétravail résulte toujours d’un accord entre l’employeur et le travailleur. Cela n’est ni un droit acquis, ni une obligation de sorte que :

  • Votre employeur ne peut pas vous imposer du télétravail ;
  • Vous ne pouvez pas l’exiger de votre employeur.
  • Si vous avez signé un avenant ou que votre contrat est en télétravail, vous êtes réputé avoir donné votre accord.

Le télétravail est toujours révocable par l’une ou l’autre des parties, ce n’est pas acquis. Cependant, en cas de signature d’un avenant ou si le télétravail figure sur votre contrat de travail, vous devrez formaliser la modification par écrit.

Vous pouvez télétravailler en France en ayant conclu un contrat étranger, vous n’avez pas besoin de modifier la législation entourant votre contrat de travail.

Télétravail et sécurité sociale

Les règles ci-dessous ne sont pas applicables aux fonctionnaires, n’hésitez pas à nous contacter !

Par principe, il existe un risque – en cas de télétravail – de basculer à la sécurité sociale de son pays de résidence en cas de temps de travail d’au moins 25%  et/ou de perception des revenus à hauteur de 25% ou plus dans son pays de résidence. Il s’agit de la règle de base qui continue à s’appliquer pour toute situation autre que le télétravail (plusieurs employeurs, cumul avec une activité indépendante…).

Un accord-cadre européen été mis en place pour rehausser ce seuil à 49,9% Ainsi, l’accord prévoit que les personnes qui travaillent dans le pays où est établi leur employeur peuvent effectuer jusqu’à 49.9 % de télétravail transfrontalier dans leur pays de résidence sans risque de basculer à la sécurité sociale de leur pays de résidence. L’Allemagne, la Belgique, la France, le Luxembourg et la Suisse ont signé cet accord.

Cet accord a une durée de validité initiale de 5 ans. Attention, la France a prévu de réaliser un bilan des conséquences après 6 mois et pourrait éventuellement revoir sa position en 2024. Les 49,9% sont donc en vigueur jusqu’au 31.12.2023 de manière certaine.

12.01.2024 : A ce jour, la France n’a pas indiqué se retirer de l’accord. Si un pays devait se retirer de l’accord :
* Un préavis de trois mois serait appliqué
* La règle initiale des 25% serait appliquée au bout de ces trois mois
En conséquence, les frontaliers peuvent à ce jour bénéficier des 49,9%, sauf communication contraire de notre part dans les prochains mois.

Par conséquent, il est possible de télétravailler jusqu’à 49,9% de son temps de travail ou de sa rémunération pour un employeur étranger sans passer à la sécurité sociale de son lieu de résidence.

Cet accord est destiné uniquement au télétravail. Il ne concerne pas :

  • Les personnes qui, en plus du télétravail, exercent d’autres activités (par exemple activité secondaire indépendante) dans le pays de résidence, même si ce pays a signé l’accord multilatéral ;
  • Les personnes qui, en plus du télétravail dans leur pays de résidence, travaillent dans un autre pays ;
  • Les personnes qui travaillent pour plusieurs employeurs qui ne sont pas situés dans le même Etat;
  • travailleur indépendant.

Le texte de l’accord et une note explicative sont disponibles ici
Concrètement, un frontalier ayant une micro-entreprise en France ne pourra pas bénéficier des 49,9%. Il sera contraint de respecter la règle des 25%.

Démarches

L’employeur devra demander une attestation A1 valable pour 3 ans maximum auprès de la caisse d’affiliation à la sécurité sociale.  

Cette attestation peut être demandée rétroactivement jusqu’aux 12 mois qui précèdent la demande. Ainsi, pour un télétravail débutant au 1er juillet 2023, votre employeur dispose de 12 mois, soit jusqu’au 30.06.2024 pour formuler cette demande.

Belgique : Attention cette dérogation ne s’applique qu’à la sécurité sociale, et non à l’obligation de déclaration Limosa. Pour rappel, une déclaration Limosa est requise pour le télétravail en Belgique au service d’un employeur étranger, par exemple en cas de travail hybride (en partie en Belgique et en partie dans les locaux de l’employeur) ou de “workation” temporaire en Belgique. Cela signifie quune déclaration Limosa doit à nouveau être faite pour les télétravailleurs qui tombent dans le champ d’application de l’obligation de notification.”

Télétravail et fiscalité

Tout dépend de la convention fiscale conclue entre le pays de résidence et le pays de travail. Ces règles sont applicables aux salariés du secteur privé.

 A partir du 1er juillet 2023, voici les règles applicables :

  • France – Luxembourg : Télétravail possible avec une imposition intégrale au Luxembourg jusqu’à 34 jours par an – au-delà imposition en France dès le 1er jour de télétravail (et non à partir du 35ème) et au Luxembourg pour les jours travaillés au Luxembourg.
  • France – Allemagne : Les travailleurs ayant le statut de frontaliers sont couverts par l’accord de 2006, le télétravail dans la zone frontalière de l’Etat de résidence est considéré comme du travail en zone frontalière. L’imposition se fait intégralement en France.  Pour les « non-frontaliers », il n’existe pas de quota applicable, l’imposition se passe en France dès le 1er jour de télétravail pour tous les jours travaillés en France.
  • France – Suisse : nouvel avenant du 27 juin 2023 autorisant jusqu’au 31 décembre 202440% de télétravail par an, sans impact sur la fiscalité pour les travailleurs avec et sans statut de frontalier fiscal. Cet accord doit être ratifié avant le 30 juin 2023.
  • France – Belgique : Pour les personnes ayant le statut de frontalier, perte du statut au-delà de 30 jours de télétravail (= travail hors zone frontalière belge) pour l’année considérée et perte définitive lorsqu’il s’agit du second dépassement. Pour les non frontaliers fiscaux, pas de quota applicable, imposition en France dès le 1er jour de télétravail.
  • Belgique – Luxembourg : Télétravail possible avec une imposition intégrale au Luxembourg jusqu’à 34 jours par an – au-delà imposition en Belgique dès le 1er jour de télétravail (et non à partir du 35ème ) et au Luxembourg pour les jours travaillés au Luxembourg. Aucune information officielle n’indique que le télétravail ne sera plus considéré comme une sortie de zone. Les conditions pour conserver ce statut fiscal sont d’ailleurs très strictes et analysées également de manière très stricte.
  • Allemagne – Luxembourg : Télétravail possible avec une imposition intégrale au Luxembourg jusqu’à 19 jours par an – au-delà imposition en Allemagne dès le 1er jour de télétravail (et non à partir du 20ème) et au Luxembourg pour les jours travaillés au Luxembourg. Un avenant signé le 6 juillet prévoit de passer de 19 à 34 jours, une ratification reste nécessaire par les deux pays pour que cela soit appliqué.

Foire aux questions – Télétravail

  • Est-ce un droit/ obligation ?

Ce n’est ni un droit ni une obligation. Cela résulte impérativement d’un accord entre l’employeur et son salarié.

  • Demi-journée de télétravail : quel décompte ?

Au regard de la sécurité sociale, une demi-journée est décomptée. Il est donc possible de faire des demi-journées de télétravail. Cependant au regard du droit fiscal, une heure télétravaillée = une journée. Ainsi, en cas de télétravail 2.5 jours/ semaine, 3 jours seront fiscalement décomptés.  

  • Télétravail et risque d’établissement stable

Il existe un risque d’établissement stable et donc d’imposition de l’entreprise concernée dans le pays de résidence du salarié qui télétravaille lorsque ce dernier représente la société, dispose d’un pouvoir de signature et commercialise des biens ou des services dans son pays de résidence. L’entreprise pourra alors se voir taxer à l’impôt sur les sociétés en France sur le chiffre d’affaires réalisé par ledit salarié.

  • Seuil de télétravail et heures supplémentaires ?

Il faut toujours se fonder sur la réalité du temps travaillé. Ainsi, les heures supplémentaires sont à prendre en compte dans le calcul des seuils de télétravail. Attention cependant : cela ne vaut que si les heures sont prestées et rémunérées. Si elles sont compensées par du repos, il y aura certes une augmentation du volume horaire à l’instant T mais ensuite une diminution de l’horaire lors de la récupération.

  • Luxembourg : 34 jours ou 49% ?

Théoriquement les 2 ! En pratique, en termes de sécurité sociale, vous pouvez télétravailler sans conséquence 49% de votre temps de travail/ rémunération. Simplement, fiscalement, vous serez imposable en France dès le 1er jour lors du dépassement du quota des 34 jours.

  • Luxembourg : Télétravail et classe d’impôt 2 ?

Le télétravail peut avoir un impact fiscal au Luxembourg sur l’imposition des frontaliers assimilés à des résidents. En effet, il faut percevoir moins de 13.000 euros nets par an hors du Luxembourg ou moins de 10% de ses revenus personnels en dehors du Luxembourg pour pouvoir demander l’assimilation et la classe 2. Des subtilités existent sur ce calcul. Pour de plus amples informations, vous pouvez nous contacter via juridique@frontaliers-grandest.eu

  • Allemagne : Télétravail ou Mobiles Arbeit ?

Le télétravail en Allemagne désigne le travail à la résidence principale du salarié alors que le mobiles Arbeit désigne le télétravail effectué de n’importe quel endroit. Il n’y a pas de distinction dans la loi française et dans l’accord multilatéral. Il pourra y avoir des conséquences fiscales notamment en cas de sorties de zone frontalière (avec statut de résident).

  • Suisse : 40% ou 49% ?

En théorie les deux. En pratique, l’employeur suisse n’ayant pas le droit de prélever de l’impôt étranger, le télétravail avec la Suisse est limité à 40% soit 2 jours par semaine.

  • Belgique : Statut frontalier

La règle générale est que vous pouvez perdre le bénéfice du statut fiscal frontalier si vous sortez de la zone frontalière plus de 30 jours par année civile (le statut est définitivement perdu lorsque vous avez dépassé deux fois ce quota) dans le cadre de votre activité.

Aucune information officielle n’indique que le télétravail ne sera plus considéré comme une sortie de zone. Les conditions pour conserver ce statut fiscal sont d’ailleurs très strictes et analysées également de manière très stricte.

Comme indiqué précédemment, si vous souhaitez refuser le bénéfice de votre statut frontalier, il faut avoir à l’esprit que l’accord actuel est temporaire.